Internet.org dans la tourmente

Lors de son lancement, nous avions critiqué Internet.org.

Sous couvert d’offrir un accès à Internet et des services aux plus défavorisés, en demandant aux opérateurs mobiles de ne pas faire payer pour les transferts de données des applis en question, le service n’est rien moins qu’un moyen pour Facebook, et quelques autres services amis, d’augmenter le nombre d’utilisateurs et d’accroître leur marché publicitaire. Sans donner d’accès universel à Internet.

C’est une opinion qui semble de plus en plus partagée. La coalition indienne Save The Internet, écrit dans le Hindustan Times* :

« Le projet ambitieux de Zuckergber consiste à faire croire à des centaines de millions de citoyens de pays émergents que Facebook et Internet sont une seule et même chose. »

Plusieurs entreprises indiennes viennent de se retirer de la coalition, lui reprochant de ne pas être compatible avec la neutralité du Net, et de fausser la compétition. En particulier cleartrip et Times Group, qui invite tous les éditeurs à se retirer de la coalition.

D’une part parce que cela donne un avantage évident aux partenaires de la coalition comparé aux autres sites. En Inde, une quarantaine de sites sont ainsi traités différemment et sont gratuits pour les usagers.

Et d’autre part, parce que les opérateurs exigent parfois depuis quelques semaines des fournisseurs de services qu’ils paient les frais de transmission à la place des clients. Ce qui ne pose problème aux géants comme Facebook ou Google, mais qui est difficilement envisageable pour des sites plus modestes ou des start-up.

Zuckerberg a répondu dans le Hindustan Times que* :

« La neutralité du Net n’est pas incompatible avec travailler pour que plus de gens soient connectés. »

Ce qui ne semble pas rassurer les Indiens, puisque d’après la BBC, 800 000 d’entre eux ont déjà écrit à leur régulateur des télécoms, TRAI (Telecom Regulatory Authority of India) pour demander un Internet gratuit et juste. (Ils seraient même 1,5 million d’après oneindia.)

Paradoxalement, le débat illustre un problème de la neutralité du Net telle que définie aujourd’hui, qui se pose aussi bien dans les pays développés: est-il raisonnable et viable à long terme que la majeure partie des bénéfices de la numérisation de l’économie aille aux services, et presque rien aux opérateurs qui les rendent possible en modernisant en permanence leurs réseaux?

* Traductions: Le Diligeant.