Linux fête ses 25 ans

Le 25 août 1991, Linus Torvalds, un programmeur finlandais inconnu à l’époque, écrivait en anglais dans le groupe de discussion comp.os.minix: *

« Bonjour à toutes les personnes ici utilisant minix. Je crée un système d’exploitation libre (juste un passe-temps, il sera pas grand et professionnel comme GNU) pour les clônes AT 386(486). En développement depuis avril, il est bientôt prêt. Je souhaite des retours sur les choses que les personnes aiment ou n’aiment pas dans minix, car mon OS lui ressemble un peu (notamment même  disposition physique du système de fichiers (pour des raisons pratiques)).

Je viens de porter bash (1.08) et gcc (1.40), et cela semble fonctionner. Ce qui implique que je vais obtenir quelque chose d’utilisable dans les prochains mois, et je voudrais savoir quelles fonctionnalités la plupart des gens voudraient avoir à disposition. Toutes les suggestions sont bienvenues, même si je ne promet aucunement de les implémenter 🙂

Linus (torvalds@kruuna.helsinki.fi)

PS. Oui, aucun code du système d’exploitation ne parviendra de minix, et le système de fichiers est multi-tâches. Il n’est PAS portable (utilise le changement de tâches du 386), et il ne supportera probablement jamais autre chose que les disques durs AT, car c’est tout ce dont je dispose 🙁

Linus Torvalds. »

Torvalds faisait allusion à Minix, un système d’exploitation minimaliste de type Unix pour les ordinateurs compatibles IBM PC, créé par le professeur Andrew Tanenbaum à des fins éducatives en 1997. La licence, restrictive à l’époque, avait suffisamment frustré Torvalds pour qu’il décide de démarrer son projet, qui deviendra l’exemple le plus marquant de logiciel libre et de code source ouvert.

Dès la version 0.99, Linux sera disponible sous la licence GNU GPL, puis ses évolutions GPL v2 en 2000 et GPL v3 en 2007.

Les clones AT font référence aux ordinateurs compatibles IBM AT, une évolution du PC s’appuyant sur le processeur Intel 80286 au lieu du 8088 du PC, avec un nouveau bus 16 bits. Puis les processeurs 80386 et 486 par la suite.

Le premier noyau du système d’exploitation Linux, qui a bien failli s’appeler Freax, fut publié le 5 octobre 1991.

Linux n’a jamais su s’imposer, malgré sa gratuité et son code source ouvert, sur les ordinateurs personnels, qui tournent le plus souvent sous Windows ou macOS.

En revanche, il a révolutionné presque tous les autres domaines : serveurs, appareils embarqués, smartphones Android, superordinateurs etc.

D’abord adopté par des passionnés, il fait son entrée dans des entreprises comme la NASA, au moment où les ordinateurs centraux et les mini-ordinateurs font place aux serveurs bon marché à base de processeurs Intel, utilisés en grappes.

Sous la direction de Lou Gerstner en 2000, IBM adoptait Linux comme système stratégique, parfois en remplacement de ses propres Unix. En 2001, IBM annonçait un investissement d’un milliard de dollars dans les développements Linux.

Cette décision, dont la principale motivation était probablement de contrer le pouvoir grandissant de Microsoft dans le monde de l’informatique, au détriment notamment d’IBM, donnait immédiatement à Linux une légitimation dans le monde de l’informatique d’entreprise.

De son côté, Microsoft avait parfois violemment critiqué Linux et le mouvement Open Source. Avec le temps, le discours a changé, et dès 2009, Microsoft contribuait du code source au kernel Linux.

Aujourd’hui plus de 20 % des serveurs virtuels du service d’informatique en nuage Windows Azure, rapidement renommé Microsoft Azure, tournent sous Linux. Et l’espace utilisateur d’Ubuntu, l’une des distributions les plus populaires de Linux, est intégré à Windows 10.

Linux est devenu un projet gigantesque. Le développement du noyau est toujours contrôlé par Linus Torvalds, qui n’hésite pas à insulter et à moquer ses contributeurs, des pratiques de gestions qui ne font pas l’unanimité et ont dégoûté plus d’un contributeur. Il estime que c’est le prix à payer pour maintenir la qualité du noyau.

La dernière version du noyau Linux, 4.7, est composée de près de 22 millions de lignes de code. Seulement 7,7 % des contributeurs ne sont pas rémunérés, une proportion en forte baisse, qui montre que Linux est de plus en plus dépendant des entreprises comme Intel, Red Hat, Linaro, Samsung ou IBM.

 

* Traduction : Le Diligent