Le programme SIRH/SI-Pay
En 2007 était lancé le projet grandiose de refonte des applications de paie des fonctionnaires et de ressources humaines : programme SIRH/SI-Paye.
Conçu modestement pour les 35 prochaines années, il visait à remplacer Remplacer les applications PAY et ETR de la DGFiP, en voie d’obsolescence et optimiser les gains de productivité en évitant la saisie multiple des données. L’aspect SIRH visait notamment à « Développer la bi-compétence gestion administrative et paye des agents des services RH des ministères ».
Comme suite à de nombreux retards, un audit confié à l’Inspection générale des finances est lancé en 2012. Il conclut : un niveau d’ambition trop élevé, un abandon problématique dès l’origine de la convergence des SIRH1, la rigidité du la modèle cible de l’ONP (NdE : Opérateur national de paye), une stratégie de déploiement insuffisamment crédible, l’absence d’une direction de programme transverse et d’un pilotage stratégique effectif.
Le programme, qui devait avoir une valeur totale sur la période 2009-2028 de 1,7 milliard d’euros, devrait en fait occasionner des pertes de 700 millions d’euros.
Le rapport de Jacques Mazin
Le premier juillet 2013, le Premier ministre demande au directeur interministériel des systèmes d’information, Jacques Marzin, le pilotage des travaux de refondation du programme SIRH/SI-Paye.
Les travaux de la mission se sont déroulés du 15 juillet au 15 décembre 2013 et un rapport est rendu le 9 janvier 2014. Il n’est rendu public que fin avril.
Il recommande l’abandon pur et simple du projet SI-Paye de l’ONP, qui a déjà coûté 234 millions d’euros aux contribuables.
Notons que cette somme ne tient pas compte des dépenses supplémentaires de chaque ministère pour la mise en conformité et de la conduite du changement de leur SIRH.
À la place, il recommande la modernisation iso fonctionnelle (jargon de consultant signifiant que l’on garde les mêmes fonctionnalités en utilisant des technologies non obsolètes) des anciennes applications PAY et ETR.
Ce plan permettrait d’économiser 200 millions de dépenses budgétaires sur 4 ans, avec une valeur actuelle nette du programme global de -670 millions d’euros.
Notre avis
Si l’on peut se gargariser à propos des travaux de juillet à décembre d’une « mobilisation interministérielle exemplaire », on peut s’effrayer de l’inefficacité de l’informatique publique. Les retards du projet healthcare.org d’Obama ont été à juste titre vertement critiqués mais l’échec du programme SIRH/SI-Paye est proportionnellement bien plus cuisant.
Si la fonction publique n’a pas le monopole des programmes pharaoniques catastrophiques, on connaît peu d’entreprises actuellement qui pensent viables la durée de vie d’une application de plus de trente ans ainsi que son développement sur plus de cinq ans.
En 2012 déjà, l’Armée s’était illustrée avec les bogues de son système de paie « Louvois » : une dizaine de milliers de militaires n’étaient plus payés.
Que les ministères n’arrivent pas à s’accorder sur un progiciel unique pour une tâche aussi peu stratégique que la paie, n’inspire aucunement confiance.
Nonobstant la nécessaire réforme de la fiche de paie et la simplification de l’imposition et des contraintes administratives, une externalisation de la fonction paie des fonctionnaires à de vrais professionnels semblerait la meilleure solution.