La Commission européenne fait pression sur les opérateurs télécoms pour accélérer le déploiement de la fibre

Accélérer le déploiement du très haut débit

À l’occasion du discours 2016 sur l’état de l’Union du président Juncker, la Commission a présenté aujourd’hui un projet de révision de la réglementation européenne en matière de télécommunications.

Partant du constat qu’en 2015, 71 % des ménages européens, mais 28 % seulement de ceux résidant dans les zones rurales, avaient accès à une connexion internet fixe rapide (vitesse de téléchargement d’au moins 30 Mb/s), et que 86 % des ménages, mais 36 % seulement dans les zones rurales profitent d’une couverture 4G, la Commission veut accélérer le déploiement du très haut débit fixe et de la 5G.

D’ici 2025, la Commission souhaite que tous les foyers européens aient accès à une connexion à Internet avec une vitesse de téléchargement de 100 Mb/s, qui puisse être convertie en connexions gigabit.

Les ‘principaux moteurs socio-économiques’ comme les établissements d’enseignement, de recherche, les prestataires de services publics devraient disposer des connexions gigabits.

Enfin, toutes les zones urbaines ainsi que les principaux axes routiers et ferroviaires devraient disposer d’une couverture 5G ininterrompue. Dès 2020, la 5G devrait être commercialement disponible dans au moins une grande ville de chaque pays de l’Union.

Si la Commission estime les investissements nécessaires à plus de 500 milliards d’euros, supportés pour l’essentiel par le secteur privé, elle fait l’impasse sur les aides financières et propose juste un nouveau code européen des communications électroniques.

Le code veut favoriser le coinvestissement en réduisant le degré de réglementation lorsque des opérateurs concurrents co-investissent dans des réseaux fixes à très haut débit.

Pour les réseaux mobiles, la Commission veut coordonner le calendrier des assignations à l’échelle européenne, accorder des licences de plus longue durée assorties d’exigences plus rigoureuses d’utilisation du spectre des radiofréquences.

 

Des propositions controversées

Les propositions de la Commission européenne sur le fixe sont loin de faire l’unanimité.

Comme les États-Unis, l’Europe a voté un cadre législatif qui prétend assurer ‘la neutralité du net’, mais qui de facto empêche principalement les opérateurs de télécommunication d’obtenir une part des des retombées économiques, qui reviennent exclusivement aux services en ligne (Netflix, YouTube, Facebook, etc). Alors même que leur succès est largement dépendant de la qualité et de la vitesse des réseaux, et des investissements gigantesques pour qu’ils soient sans cesse plus rapides.

On remarquera par exemple que Google commence à découvrir l’extrême difficulté à rentabiliser un réseau fibre: d’après The Information, Larry Page et Sergey Brin auraient prié leur filiale Google Fiber ultra déficitaire de bien vouloir réduire les effectifs par deux. Et de largement réduire les objectifs de déploiement, alors que la filiale est bien loin d’avoir rempli son objectif des cinq millions de clients.

Maintenant, la Commission européenne veut forcer ces mêmes opérateurs à investir des sommes colossales, sans leur donner les moyens d’assurer un retour sur investissement.

Alors que 60 à 70 % des investissements en télécommunication proviennent de grands opérateurs régulés, ils devraient dans les faits donner un accès gratuit aux conduits, et le modèle de coinvesitssement leur serait imposé.

Car ils ne pourraient négocier le prix d’accès au réseau que dans l’optique d’un projet à plusieurs. Ils ne pourront pas négocier librement le prix d’accès à un réseau qu’ils ont développé seuls.

Sans possibilité de négocier les tarifs, et avec un environnement réglementaire qui ne fait pas confiance au marché libre, certains opérateurs estiment qu’il leur est impossible de rentabiliser des investissements très coûteux dans la fibre.

Enfin, on peut s’interroger sur la viabilité économique de la fibre à long terme. Les évolutions technologiques laissent à penser que de futurs réseaux sans fils pourraient offrir des connexions très haut débit, avec des investissements de départ et des coûts d’entretien du réseau bien moindre.