Les deux pionniers de la cryptographie moderne Whitfield Diffie et Martin Hellman remportent le Turing Award 2015

Whitfield Diffie et Martin Hellman ont remporté l’A.M. Turing Award 2015 de l’ACM, Association of Computing Machinery.

L’ACM a procédé à l’annonce officielle lors de la RSA Conference à San Francisco, l’un des plus grands rassemblements de cryptographes au monde.

Doté cette année de 1 000 000 $ (922 000 €), ce prix, en l’honneur d’Alan Mathison Turing, le mathématicien, cryptographe et informaticien anglais de génie, qui a profondément influencé le développement de l’informatique, est la plus haute récompense en informatique, l’équivalent de la médaille Fields en mathématiques ou du prix Nobel en physique.

Whitfield Diffie, précédemment chef de la sécurité de Sun Microsystems, et Martin E. Hellman, professeur émérite d’ingénierie électrique à l’Université de Stanford, sont récompensés pour leur contribution à la cryptographie moderne dans leur article avant-gardiste de 1976, ‘New Directions in Cyptography‘.

Ensemble, ils ont inventé la cryptographie asymétrique, une méthode de chiffrement qui repose sur l’utilisation d’une clé publique, qui est diffusée, et d’une clé privée, qui est gardée secrète, l’une permettant de coder le message et l’autre de le décoder.

Il est difficile de surestimer l’impact de cette invention, qui permet à deux entités de communiquer en privé à l’aide d’un canal sécurisé. Nous l’utilisons tous les jours lorsque nous utilisons la banque en ligne, achetons en ligne, envoyons des courriels, et à chaque fois que nous nous dirigeons vers un site Web dont l’adresse commence par https.

Ils ont aussi montré qu’en inversant l’ordre des opérations, on pouvait créer une signature numérique. Alors que la signature traditionnelle d’un chèque d’un euro est la même que celle d’un chèque d’un million d’euros, une signature numérique n’est utilisable qu’avec le message qui a été signé.

Auparavant, on utilisait la cryptographie symétrique pour laquelle une même clé était utilisée pour le chiffrement et le déchiffrement. Le talon d’Achille de cette méthode est la gestion, et notamment la distribution, de cette clé.

Diffie et Hellman ont travaillé sur la cryptographie au moment où elle était dominée par la NSA, National Security Agency, et qu’on tentait de les décourager de s’y intéresser. Diffie et Hellman sont souvent rentrés en conflit avec la NSA. Ils accusèrent cette dernière d’avoir forcé IBM à avoir affaibli le standard de chiffrement DES (Data Encryption Standard du National Bureau of Standards) en limitant la clé utilisée à 56 bits au lieu de 64 bits ou plus.

La NSA envoyait régulièrement des lettres aux éditeurs  pour les prévenir que les auteurs risquaient la prison pour ne pas respecter la loi sur la limitation des exportations d’armes militaires.

Le prix sera présenté le 11 juin 2016 à San Francisco.

L’an dernier, le prix avait été remporté par Leslie Lamport de Microsoft Research, pour ses contributions sur les systèmes distribués.