Intel veut convaincre les analystes financiers qu’elle est bien positionnée pour l’ère ‘orientée-données’

Hier, Intel a tenu son Data-Centric Innovation Summit, une journée pour convaincre les investisseurs.

L’entreprise a révélé qu’en 2017, elle avait vendu 1 milliard de dollars de processeurs Xeon pour l’intelligence artificielle.

Navin Shenoy, en charge du Data Center Group de Intel, rappelle que la production de données explose, ce qui nécessiterait de reconsidérer l’informatique comme ‘orientée données’. Pour Intel, cela se traduirait par un marché total adressable considérablement étendu à 160 milliards de dollars en 2021 et 200 milliards en 2022.

Il faut déplacer les données plus vites, d’où les innovations de Intel en photonique, et des nouvelles cartes réseau, nom de code Cascade Glacier, disponibles en 2019, pour tirer toute la puissance d’un processeur Xeon Scalable.

Il faut stocker plus de données : Intel offre la mémoire Optane DC, un niveau intermédiaire entre la mémoire vive et le SSD. Intel va prochainement présenter ses SSD de technologie QLC 3D NAND.

Il faut traiter plus de données. Il dévoile la feuille de route pour les processeurs Xeon :

  • Cascade Lake est un futur processeur Intel Xeon Scalable, dont le lancement est prévu cette année, fabriqué avec un process de 14 nm, qui va ‘introduire’ la mémoire persistante Intel Optane DC, et un nouveau jeu de fonctionnalités pour l’IA, nommé Intel DL Boost, qui lui permettrait d’effectuer des reconnaissances d’images 11 fois plus rapidement que la génération de juillet 2017.
  • Cooper Lake est un futur processeur Intel Xeon Scalable, toujours fabriqué avec un process de 14 nm, dont le lancement est prévu en 2019, qui apportera des améliorations additionnelles : Bfloat16 pour l’intelligence artificielle, nouvelles fonctionnalités d’entrées sorties, innovations additionnelles pour Optane DC.
  • Ice Lake sera le premier processeur Xeon Scalable fabriqué avec un process de 10 nanomètres, et qui sera lancé en 2020.

Et c’est sur ce point que Intel ne convainc pas.

Intel a assis sa domination du secteur des semi-conducteurs (dont il a de perdu le leadership au profit de Samsung cette année) au cours des dernières décennies sur deux facteurs :

  • Partenaire de Microsoft dans le duo Wintel qui a dominé si longtemps la micro-informatique puis l’informatique d’entreprise ;
  • Toujours au moins une génération d’avance sur la technologie de fabrication des processeurs.

Fabriquer avec un process de fabrication plus fin, c’est réduire les coûts de production (plus de puces par wafer), et normalement produire des puces plus rapides et consommant moins d’électricité que la génération précédente. Les gains sur la concurrence sont investis dans les outils de fabrication de prochaine génération, ce qui crée un cercle vertueux.

Ce cercle vertueux est terminé, et l’on peut se demander si c’est à cause de la diversification à tout prix de Intel, des technologies mettables aux drones. Non seulement Intel n’a plus une génération d’avance sur ses concurrents, mais il aura bientôt deux générations de retard sur eux : AMD doit produire ses premiers processeurs EPYC en 7 nm en 2019, quand Intel en sera encore au 14 nm.

Pourtant, en 2013, Intel avait promis le passage aux 10 nanomètres pour 2015. Une date reculée chaque année, Intel promettant désormais un démarrage en 2019.

Ce qui explique pourquoi Shenoy affirme :

« Je ne parle pas de nanomètres aux clients. »

Il y a deux ans, le concurrent AMD a renaît de ses cendres. Alors que AMD avait habitué à ne pas savoir profiter financièrement d’un avantage technologique (Opteron), ou tout simplement de ne pas proposer de processeur compétitif, la donne a changé.

AMD offre un ensemble de processeurs pour les ordinateurs comme pour les serveurs qui sont techniquement comparables voire meilleurs que les processeurs Intel, à prix plus bas, et AMD a pris l’habitude de dégager des profits à chaque trimestre.

Alors que Intel s’est arrogé près de 98 % du marché des processeurs pour les centres de données, il n’est pas exclu que AMD capture jusqu’à 20 % de ce marché à Intel dans les prochaines années. Or, c’est le marché le plus rentable pour les processeurs.

Intel est passé de chasseur à proie, de leader à suiveur. Exemple : AMD invente une nouvelle niche avec le ThreadRipper, quelques mois après Intel suit avec une nouvelle offre de processeurs avec de nombreux cœurs.

Shenoy ne semble pas avoir convaincu les analystes financiers, le cours de l’action baissant de 0,20 % avant l’ouverture de la Bourse.