Chaînes de blocs : beaucoup de bruit pour rien ?

Le numérique est un secteur qui vit de la nouveauté.

Depuis quelques années, la mode est aux chaînes de blocs, une technologie de stockage et de transmission d’informations sans organe de contrôle inventée pour les actifs numériques.

Il s’agit d’une base de données distribuée dont les informations envoyées par les utilisateurs et les liens internes à la base sont vérifiés et groupés régulièrement en blocs, puis chiffrés, formant ainsi une chaîne. C’est un registre distribué et sécurisé de toutes les transactions effectuées depuis le démarrage du système réparti.

Comme toutes les nouvelles technologies, elle doit révolutionner le monde, dans la banque, la finance, et tous les échanges entre plusieurs partis.

John Burg, un professionnel confirmé du développement international à l’USAID, d’abord très enthousiaste sur les chaînes de bloc, a mené une étude avec deux autres partenaires à l’issue de laquelle son orientation a changé du tout au tout.

Il a cherché des exemples de chaînes de blocs en utilisation par les organisations non gouvernementales, les contractants et les agences, dans toute une gamme de situations.

Si de nombreux communiqués de presse, livres blancs et articles de propagande ont été trouvés, son équipe n’a trouvé aucune documentation, ni aucune preuve que les chaînes de blocs atteignaient bien les buts médiatisés. Ni des synthèses des leçons apprises, comme on en trouve généralement dans les technologies en développement.

Pareillement, alors que les vendeurs contactés de chaînes de blocs annonçaient monts et merveilles, ils devinrent étrangement silencieux quand l’équipe leur demandait des preuves du succès sur le terrain.

Souvent, les projets de chaînes de blocs sont lancés par des politiciens et/ou des personnes sans compétence technique. Eddie Hugues, un député du Royaume-Uni, a ainsi reconnu dans le Financial Times que leur adoption était souvent basée uniquement sur la foi dans les promesses des vendeurs et des consultants.

Alors qu’il faudra typiquement débourser 15 000 euros pour apprendre d’un consultant si la chaîne de blocs est appropriée pour un projet.

Pourtant, les écueils des chaînes de blocs ne devraient pas surprendre les informaticiens.

Par construction, elles posent des problèmes de mise à l’échelle et de performance, et le chiffrement peut induire en erreur sur la sécurité du système.

Comme on l’a vu avec les crypto-monnaies, la chaîne de blocs n’empêche pas les vols – elle les facilite même quand elle est anonyme – elle est inefficace pour le groupage et le chiffrement des enregistrements, d’où le paiement des mineurs, et finalement, c’est une catastrophe écologique tant elle nécessite de l’électricité et des montagnes de serveurs de calcul.

La balle est donc dans le camp des vendeurs et des consultants : documenter et apporter la preuve des succès de leur chaîne de blocs sur le terrain.