Géo-blocage en Europe: une victoire et une défaite cette semaine pour les consommateurs

Cette semaine, deux décisions importantes ont été prises à l’échelle de l’Union européenne concernant le géo-blocage.

Géo-blocage des ventes en ligne

Le Parlement européen, le Conseil et la Commission européenne ont trouvé un accord pour mettre fin aux géo-blocages injustifiés pour les ventes, comme s’y était engagée la Commission lors du Sommet Numérique à Tallinn en septembre.

Dans ce contexte, le géo-blocage est le refus de vendre des produits ou des services à des consommateurs qui ne vivent pas dans le même État membre que le vendeur.

Les nouvelles règles distinguent trois cas spécifiques où le géo-blocage est injustifié :

La vente de marchandise sans livraison. Exemple : un consommateur français trouve le meilleur prix pour un réfrigérateur en Allemagne. Il pourra désormais commander le produit, du moment qu’il le collecte dans l’un des locaux du vendeur, ou qu’il organise lui-même son envoi à sa maison ;

La vente de services en ligne. Exemple : une consommatrice bulgare veut faire héberger son site web par une entreprise espagnole. Elle pourra désormais avoir accès à ce service, s’enregistrer, et bénéficier du même prix qu’un consommateur espagnol, sans surcharge ;

– La vente de services fournis dans un endroit spécifique. Exemple : une famille italienne peut acheter un voyage directement sur le site d’un parc d’attractions en France, sans avoir à être redirigé sur un site web italien.

La nouvelle régulation n’impose pas de vendre ni d’harmoniser les prix. Toutefois, elle met fin aux discriminations pour l’accès aux produits et services quand elles ne peuvent pas être objectivement justifiées.

La régulation entrera en vigueur neuf mois après son inscription au Journal Officiel de l’Union Européenne, afin de laisser du temps aux vendeurs pour s’y adapter.

 

Géo-blocage des diffusions en ligne

La Commission européenne a souhaité réformer en profondeur le droit d’auteur afin de l’adapter à l’ère numérique et de créer un marché numérique vraiment européen.

Sans enfreindre les principes de territorialité et de liberté contractuelle, la proposition initiale visant à supprimer le géo-blocage des diffusions en ligne, offrait aux téléspectateurs européens la possibilité d’écouter ou de regarder des contenus en ligne, au-delà des frontières, sur le site web du diffuseur ou sur une plateforme tierce autorisée.

Malheureusement, les députés européens membres du Comité juridique (JURI) ont cru bon de réduire drastiquement la portée du principe du « pays d’origine » à l’information et aux magazines d’actualité.

Ce principe permet à un diffuseur, une fois les droits de diffusion reçus dans son pays d’origine, de diffuser leur contenu en ligne dans toute l’Europe.

Les diffuseurs pourront donc continuer de géo-bloquer leur contenu en ligne si le propriétaire des droits et le diffuseur le souhaitent dans leur contrat.

C’est une victoire pour le lobby du football, des producteurs de films et des chaînes commerciales de télévision qui pourront continuer de géo-bloquer et/ou négocier les meilleurs prix de licences pays par pays.

Matthieu Morieu, président du groupe de pressions Creativity Works, qui regroupe des chaînes commerciales, des ligues de football et des studios hollywoodiens, s’en réjouit, le vote étant la reconnaissance de l’importance de l’exclusivité territoriale comme élément vital des industries créatives européennes.

Un vote au détriment des consommateurs, qui ne pourront pas regarder ce type d’émission sur un support moderne, au-delà des frontières.

Andrus Ansip, le vice-président de la Commission européenne et en charge du marché unique numérique, a publiquement regretté la décision du Parlement, qui n’apporte rien à la législation actuelle, et qui va désappointer les Européens qui souhaitent accéder à plus de contenus sans frontière.

La European Broadcasting Union (EBU), qui regroupe 73 membres (groupes de télévision ou de radio) en Europe, regrette également cette décision sur la législation ‘SatCab‘.

Elle estime que cette décision va inciter les consommateurs à passer par des services en ligne illégaux, et pourrait même rendre les groupes non-européens encore plus forts.

 

Le vote de mardi n’est pas final, le Parlement européen devra trouver un compromis avec les États Membres.