Orange rachèterait Cloudwatt

En septembre 2012, le fournisseur de services cloud Cloudwatt était créé dans le cadre du Programme d’Investissements d’Avenir, avec pour actionnaires Orange (44,4 %, Thales (22,2 %) et la Caisse des Dépôts (33,3 %).

Pour l’État, il s’agissait de créer des cloud souverains, capables de rivaliser avec les meilleurs du secteur (i.e. les Américains AWS et Microsoft Azure), tout en garantissant la souveraineté nationale en gardant les données et les infrastructures en France, sous droit français.

La loi américaine ‘USA Patriot Act‘ oblige ainsi les fournisseurs d’infrastructure américains à remettre les données de leurs clients, même étrangers, sur demande de justice. Les agences des forces de l’ordre américaines souhaitent même court-circuiter le droit international : un mandat de perquisition international doit être approuvé par la cour étrangère pertinente pour des dossiers ‘papier’. Les agences estiment que ces lois ne s’appliquent plus pour les données numériques. Une interprétation contre laquelle se battent les entreprises technologiques américaines, et au premier chef Microsoft.

Le choix exclusif et discutable de l’OpenStack, qui voudrait être au cloud ce que Lamp (Linux, Apache, MySQL, PHP) fut aux sites Web, a considérablement ralenti l’offre commerciale de Cloudwatt, qui a été formulée seulement en juillet 2014.

Cloudwatt aurait pu tout aussi bien opter, parallèlement à l’OpenStack, pour une API compatible avec Amazon Web Services, et/ou Microsoft Azure. Ce qui aurait eu l’avantage de faciliter les tests et l’éventuelle migration de clients.

Du coup le chiffre d’affaires 2013 s’élève à peine à quelques centaines de milliers d’euros, et le chiffre d’affaires 2014 à quelques millions d’euros, à des années-lumière des prévisions originales.

Sans compter sur l’offre concurrente du deuxième cloud souverain français, Numergy, lui aussi soutenu par l’État via la Caisse des Dépôts, et qui a pour actionnaires Bull et SFR. Numergy a selon toute vraisemblance des résultats aussi médiocres que ceux de Cloudwatt.

Axelle Lemaire, secrétaire d’État en charge du numérique aurait poussé pour la fusion des deux fournisseurs, mais l’évolution des actionnaires de Numergy aurait rendu une telle transaction difficile : Bull a été depuis racheté par Atos, et SFR par Numericable.

Aujourd’hui, Orange annonce vouloir racheter leurs parts à Thalès et à la Caisse des Dépôts. Orange reprendrait alors la totalité des salariés de Cloudwatt. Elle renforcerait alors ses offres professionnelles en matière d’infrastructure en tant que service (IaaS), ce qui serait facilité par le virage stratégique de Cloudwatt qui n’offre plus de services grand public et se concentre sur la clientèle d’entreprise.