La Suisse se profile comme une ‘cryptonation’

Alors que la classe politique internationale s’alarme de plus en plus des risques associés aux cryptomonnaies, et s’interroge sur les régulations et les interdictions à adopter, la Suisse y voit une opportunité et un moyen de se démarquer.

C’est ainsi que l’Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers, FINMA, vient de publier un guide pratique sur les Initial Coin Offerings (ICO), pour expliquer quelles lois s’appliquent dans les domaines de la lutte contre le blanchiment d’argent et du négoce de valeurs mobilières.

Un ICO permet d’effectuer une levée publique de capitaux sous forme numérique, des jetons, ‘à des fins entrepreneuriales’, sur la base de la technologie de la chaîne de blocs. Il est souvent présenté comme une alternative à l’IPO, ou introduction en Bourse.

D’après PwC, quatre des dix premières ICO en valeur ont été lancées en Suisse.

Pour la FINMA, le droit régissant les marchés financiers n’est pas applicable à tous les ICO et l’obligation d’assujettissement n’est pas systématique, car la définition des ICO est extrêmement variable. Il n’y a, en revanche, pas encore d’exigences réglementaires spécifiques concernant les ICO. Actuellement, il n’y a pas non plus de jurisprudence applicable ni de doctrine juridique uniforme.

La FINMA distingue trois types de jetons, des formes mixtes étant également possibles :

Les jetons de paiement sont assimilables à des « cryptomonnaies » pures, sans être liés à d’autres fonctionnalités ni projets. Dans certains cas, les jetons ne peuvent développer la fonctionnalité nécessaire et leur acceptation comme moyen de paiement qu’au fil du temps.

Ils sont clairement soumis aux dispositions en matière de blanchiment d’argent, mais pas traités comme des valeurs mobilières.

Les jetons d’utilité sont des jetons qui doivent donner accès à un usage ou à un service numériques.

Ils ne sont pas considérés comme des valeurs mobilières s’ils confèrent uniquement un droit d’accès à un usage ou à un service numériques et qu’ils sont utilisables dans ce sens à la date d’émission. Dans tous les cas où la fonction économique en tant qu’investissement existe également (ou seule cette fonction existe), la FINMA les traite comme des valeurs mobilières (comme des jetons d’investissement).

Les jetons d’investissement représentent des valeurs patrimoniales telles que des parts dans des valeurs réelles, des entreprises, des revenus ou un droit à des dividendes ou des intérêts. Sous l’angle de sa fonction économique, le jeton doit être considéré comme une action, une obligation ou un instrument financier dérivé.

La FINMA considère les jetons d’investissement comme des valeurs mobilières avec les conséquences correspondantes sur leur négoce dans l’optique du droit des marchés financiers. En règle générale, cette approche implique également pour les ICO des obligations correspondantes selon le Code des obligations (par ex. obligations d’établir des prospectus).

La FINMA rappelle qu’elle a mis en garde à plusieurs reprises sur les risques des ICO pour les investisseurs : volatilité, incertitudes en lien avec les projets à financer, incertitudes quant au droit en vigueur.

Elle se réserve le droit de publier dans une circulaire l’interprétation des lois régissant les marchés financiers en vigueur concernant les ICO dans des cas concrets, et procède à des clarifications dans plusieurs cas d’ICO. Si la FINMA dispose d’indices selon lesquels des modèles d’affaires ICO enfreignent le droit de la surveillance, permettent de contourner les lois sur la surveillance ou ont même été mis en place dans une intention frauduleuse, elle engagera des procédures d’exécutions des mesures.